Aujourd’hui entraîneur des U16 de Moulins-Yzeure (Allier), Kodjo Afiadegnigban-Gandard a également exercé le métier de recruteur… Ce qui lui a permis de croiser la route d’Antoine Griezmann.
Il est un homme de l’ombre. Bien connu dans l’agglomération moulinoise, cet ancien joueur amateur n’est pas de ceux qui apprécient de se mettre sous les projecteurs. Pourtant, Kodjo Afiadegnigban-Gandard (son nom complet) a des histoires à raconter. Comme celle de son arrivée en France, à Marseille, à 14 ans, en provenance de son Togo natal.
« Je suis arrivé grâce à l’ancien international français, Christian Dalger. À l’époque, les mineurs venaient facilement. J’ai joué à Vitrolles, puis au centre de formation de Toulon. Ensuite, je suis parti à Épinal, Montpellier, avant d’arriver ici. »
KODJO AFIADEGNIGBAN
Ici, c’est l’Allier. Un département qu’il n’a que très peu quitté en 20 ans, depuis sa venue à Moulins. « J’ai une vie ici désormais. Il y a juste le froid qui est un peu compliqué, mais on fait avec », rigole l’actuel entraîneur des U16 de Moulins-Yzeure.
Entraîneur à un niveau régional
Si Kodjo a commencé par jouer à feu-AS Moulins, avec qui il est monté en CFA 2 (ex-National 3), il a aussi joué à l’AS Yzeure. « Nicolas Dupuis (l’ancien entraîneur du club) me voulait. En plus, l’ASY m’a permis de financer ma formation pour devenir entraîneur. »
Car déjà à l’époque, Kodjo se soucie de son après-carrière. « J’ai rapidement passé mon diplôme, car je savais qu’il faudrait s’orienter vers autre chose un jour. Et comme je suis passionné par le football… » Son diplôme en poche et sa carrière de joueur terminée, Kodjo s’installe sur son premier banc. Celui de Dompierre-sur-Besbre, alors en DH (désormais Régional 1). Ensuite, Kodjo part à Gannat, en PH, puis à Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire), où il remporte une Coupe de Bourgogne devant l’AJ Auxerre.
Un but et quatre passes décisives
Mais Kodjo veut voir autre chose. En 2004, il devient recruteur pour le FC Metz. Une aventure, qui le mènera notamment à Mâcon, le 21 novembre 2004. Ce jour-là, les U14 locaux reçoivent Gueugnon. Et un joueur s’illustre particulièrement. Avec un but et quatre passes décisives, un dénommé Antoine Griezmann tape dans l’œil de Kodjo.
Il avait une super vision du jeu. Il était capitaine, il menait l’équipe. Il était élégant sur le terrain. À cette époque, il jouait en meneur de jeu, mais il n’hésitait pas à descendre chercher les ballons.
Le recruteur n’hésite pas non plus, et envoie un rapport à Metz. Mais la suite de l’aventure ne se passe pas comme prévu. L’actuel international français et joueur du FC Barcelone, alors âgé de 13 ans, reste plusieurs jours à Metz pour faire un essai.
À l’issue de ces tests, les dirigeants lui proposent de s’entraîner toute la semaine en Moselle et de rentrer jouer à Mâcon les week-ends. Un choix accepté par le clan Griezmann. Pourtant, quelques jours plus tard, renversement de situation. Le club grenat ne conserve finalement pas le jeune milieu de terrain, à cause de sa taille. « Le papa, Alain, a voulu envoyer des tests au poignet, pour prouver que son fils grandirait par la suite, en vain. Alors Alain a envoyé “Je vous donne rendez-vous dans quelques années” à Metz. »
« J’aime être utile auprès des jeunes »
Aujourd’hui, Kodjo a pris du recul sur cet épisode. « C’est une fierté, je suis l’une des premières personnes à avoir cru en Antoine. Je n’ai pas de regret. Maintenant, je suis ravi qu’il réussisse. » Une fierté, dont il ne s’est pourtant jamais vanté. « Beaucoup de gens, quand ils l’apprennent, me disent : “Mais pourquoi tu ne l’avais pas dit ?”. Je n’ai jamais eu envie de tirer la couverture à moi, par pudeur peut-être. »
Aujourd’hui, après avoir également goûté au métier d’agent, Kodjo est revenu sur les bancs auvergnats, avec ses U16. « J’aime être utile auprès des jeunes », se plaît-il à rappeler. Mais celui qui est le représentant officiel de Swallows – un centre de formation de footballeurs togolais – en France aimerait se rapprocher un peu plus de son pays d’origine. « Pourquoi pas avoir un rôle dans une sélection de jeunes, ou à un poste de Directeur Technique National. » À 40 ans, Kodjo semble donc loin d’en avoir fini avec le football.
Voici le mail envoyé par Kodjo au FC Metz, en novembre 2004 : « Gaucher, milieu de terrain offensif, très bon techniquement et possède une bonne vision du jeu, beaucoup de précision dans ses passes. Il est à l’origine des cinq buts de Mâcon et en plus c’est un meneur d’hommes. Physiquement de taille moyenne mais très important dans le match. URGENT (sic) à voir le plus vite possible. »
Alain Griezmann, le père d’Antoine, se rappelle…
Alain Griezmann se souvient de sa première rencontre avec Kodjo, et de l’essai de son fils, l’actuel joueur du FC Barcelone, au FC Metz.
« Kodjo était venu nous voir pendant un match de championnat. Il avait repéré Antoine (Griezmann), et était venu me demander s’il voulait venir faire un essai sur Metz. Deux recruteurs étaient sur Antoine à l’époque : Kodjo et Alain Duthéron, de l’Olympique Lyonnais. Kodjo a fait le forcing pour qu’on aille à Metz. Antoine a fait un essai là-bas, à l’issue duquel Sébastien Muet, directeur technique du centre de formation du club, m’avait dit que le club souhaitait le garder. Mais quinze jours après, je n’avais toujours pas de nouvelles… Le club n’a jamais eu le courage de nous prévenir. C’est Kodjo qui s’était renseigné et qui nous a appris qu’Antoine ne serait pas conservé. C’est peut-être un mal pour un bien, mais c’est vrai qu’Antoine a été très déçu par le FC Metz, parce qu’ils nous avaient promis quelque chose. Kodjo, c’est quelqu’un que j’apprécie. Il a toujours été honnête avec moi. Je sais qu’il a été déçu qu’Antoine ne signe pas à Metz. En plus de cela, c’est quelqu’un qui connaît très bien le football. »
source : La montagne