Plusieurs blessés enregistrés lors de la bousculade survenue lundi au Stade d’Olembe en marge de la rencontre Cameroun-Comores comptant pour les huitièmes de finale de la CAN 2021 courent des risques de traumatismes. Trois jours après le drame, des familles peinent à se remettre de ces événements tragiques.
Le Centre des Urgences de Yaoundé retrouve peu à peu son ambiance normale. Avec le drame survenu au Stade d’Olembe en marge de la rencontre Cameroun-Comores comptant pour les huitièmes de finale de la Coupe d’Afrique des Nations 2021, les trois derniers jours ont été plus que mouvementés dans cette formation hospitalière spécialisée dans la prise en charge des cas d’urgence.
« C’était un véritable marathon ici depuis lundi soir. Nous avons été envahis par les familles des victimes. Ils venaient s’enquérir de la situation de leurs proches victimes de la bousculade du stade d’Olembe », confie un infirmier du Centre.
Difficile d’avoir plus d’informations sur l’évolution de la situation à ce niveau. À notre passage, le Directeur du CURY, Dr Louis Joss Bitang à Mafok, le seul selon ses collaborateurs pouvant dévoiler certains détails, est absent. Joint au téléphone par le reporter, le médecin n’a pas souhaité s’exprimer.
« Je ne veux plus m’exprimer sur cette situation. J’ai déjà dit tout ce que je pouvais au lendemain du drame devant certains médias. Actuellement, seules les autorités peuvent mieux vous renseigner sur le sujet », réagit le professionnel de la santé.
À l’Hôpital central de Yaoundé, près d’une dizaine de blessés sont pris en charge au service de Gastroentérologie devenu le bâtiment le plus visité de ces derniers jours dans ce centre hospitalier. Ils sont pour la plupart hors de danger. Mais, il faudra du temps pour effacer les traumatismes laissés à la fois aux blessés et à leurs proches. Quelques garde-malades racontent leur calvaire.
« Ma fille ne se rendait jamais au stade auparavant. Le diable l’a détournée pour l’envoyer au stade d’Olembe lundi. Dieu ne dort pas. Grâce à lui, elle se remet progressivement. Elle réussit déjà à poser ses deux pieds au sol », confie une maman au chevet de sa fille de 27 ans. « J’étais à la maison quand le père de son enfant m’a appelé depuis Sangmelima pour me parler de la situation. Elle avait réussi à donner son numéro avant de perdre totalement conscience. Quand je suis arrivé au Dispensaire Messassi, j’ai vu plusieurs corps alignés. J’ai même vu le corps d’une dame qui ressemblait à ma fille et j’ai commencé à pleurer à chaudes larmes. C’est après que je me suis rendu compte que ce n’était pas elle. J’ai continué la fouille jusqu’à la retrouver dans un coin. Elle était méconnaissable et complètement recouverte de poussière », raconte la dame qui n’a pas fermé un seul œil depuis lundi soir.
Stéphane K. lui, s’apprête à quitter l’hôpital avec son épouse. Elle faisait également partie des blessés. Les résultats du scanner réalisé au niveau du cœur n’ont révélé aucun véritable danger.
« Un vrai miracle de Dieu », s’écrie le quarantenaire dont la femme a été piétinée au niveau de la poitrine lors de la bousculade. « Ma femme avait reçu des billets gratuits pour le match et voulait qu’on y aille. Moi, étant revenu tard du travail, j’ai préféré qu’elle s’y rende avec mon fils de 18 ans. Je rends grâce à Dieu puisque si elle n’était pas partie avec cet enfant, elle n’aurait pas eu la vie sauve dans la mesure où quand les secours l’ont trouvée inerte, ils étaient convaincus qu’elle était décédée et désirait la diriger vers la morgue. L’enfant a dû intervenir pour leur faire comprendre qu’elle était encore en vie », raconte-t-il.
Traumatisme
À l’Hôpital Central de Yaoundé, un accent est aussi mis sur la prise en charge psychologique des blessés et de leurs visiteurs. Tous les jours, des équipes de psychologues se succèdent pour tenter d’anticiper sur les traumatismes psychiques que cette expérience pourrait laisser aux victimes, à leurs familles ainsi qu’au personnel de santé. Parmi les cas les plus préoccupants, celui d’une jeune étudiante dont le fiancé est mort étouffé dans ces bousculades. Alors qu’elle se remet progressivement des douleurs atroces au niveau de la tête, qui a reçu plusieurs coups lors de ces incidents, difficile pour sa famille venue de Bafoussam, de trouver la meilleure astuce pour lui annoncer le décès de celui qu’elle demande à voir tout le temps. « Pour la préparer lentement, on lui a fait savoir que son mari était dans le coma et donc, impossible pour elle de s’entretenir avec lui, même au téléphone. Si elle reçoit cette information maintenant, elle sera forcément traumatisée », explique un de ses proches.
Comme au Centre des Urgences de Yaoundé, la consigne reçue par le personnel est respectée à la lettre : pas un mot à la presse. « La seule voix autorisée pour parler de cette affaire reste celle du Directeur », nous souffle-t-on à la cellule de communication de l’Hôpital. Tous les efforts déployés par le reporter pour rencontrer le médecin afin d’avoir plus de détails sur la situation des blessés, se sont avérés vains. L’on apprend qu’en dehors du CURY et de l’Hôpital central de Yaoundé, d’autres blessés séjournent également à l’Hôpital Général de Yaoundé, au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Yaoundé et au dispensaire de Messassi. Mardi, le président de la Confédération africaine de football a fait le tour des hôpitaux concernés pour réconforter les blessés dont la prise en charge reste gratuite malgré quelques goulots d’étranglement.
C’est dans la morgue de l’Hôpital central de Yaoundé que se trouvent les corps des personnes décédées au cours de l’incident de lundi.
Selon les autorités, les chiffres des victimes n’ont pas évolué. L’on parle toujours de huit morts et 38 blessés. Des statistiques qui ne semblent pas faire l’unanimité auprès de certains témoins qui prétendent avoir compté plus de morts.